En période d'élection présidentielle, il est normal que les débats soient politisés. Non ?
lundi 12 mars 2007, mis Ă jour Ă 18:55
François Bayrou solidement ancré à sa place de troisième hommeReuters
François Bayrou a-t-il changé ? Propulsé en quelques semaines par les sondages de la place d'outsider à celle de présidentiable sérieux, le candidat de l'UDF ne montre pour l'instant aucun signe d'essoufflement, constatent des analystes.
"Manifestement, il a plus d'assurance", remarque Paul Bacot, professeur Ă l'Institut des Ă©tudes politiques de Lyon.
"Au début, c'était la méthode Coué, il assurait qu'il allait gagner alors que personne n'y croyait (...) Cela dit, son discours ne change pas vraiment et son programme non plus", ajoute le spécialiste du langage politique.
Même constat chez Jérôme Fourquet, directeur adjoint du département opinion publique de l'Ifop. "Depuis le début de la campagne, il a gagné en conviction, il se pose comme la force tranquille, quelqu'un qui ne souhaite pas qu'on lui marche sur les pieds, un candidat ferme et réfléchi qui ne déviera pas de sa route", constate le politologue.
Parti de moins de 10% fin 2006 dans les sondages, François Bayrou a franchi la semaine dernière la barre des 20%, recueillant jusqu'à 24% d'intentions de vote pour le premier tour; il talonne désormais ses rivaux socialiste Ségolène Royal et UMP Nicolas Sarkozy.Aux yeux de Jérôme Fourquet, ce n'est pas François Bayrou qui a changé ces temps-ci, mais le discours de ses adversaires.
"Après avoir feint l'ignorance, ils ont essayé différentes stratégies, différentes postures sans avoir pour l'instant réussi à endiguer le phénomène", dit-il. "Etre ainsi pris sous les feux croisés a amené de l'eau à son moulin".
Dernières répliques en date : le refus du socialiste Dominique Strauss-Khan d'entrer, le cas échéant, dans l'équipe gouvernante du candidat centriste et le ralliement de Simone Veil, grande figure de l'UDF, à Nicolas Sarkozy.
STABILISATION DE L'ÉLECTORAT
Pour Paul Bacot, la montée de François Bayrou peut s'expliquer de deux façons : soit il plaît, soit "il bénéficie des faiblesses et des difficultés des autres".
Le politologue s'étonne en effet de voir Ségolène Royal stagner autour de 25% dans les sondages "alors qu'il n'y a ni candidat dissident, ni candidat radical de gauche, que les écologistes et le Parti communiste touchent le fond".A droite, "la personnalité particulière de Nicolas Sarkozy peut susciter des rejets et des réticences", ajoute-t-il. "Donc il y a un espace".
C'est désormais en chef d'Etat potentiel que François Bayrou poursuit ses déplacements quasi quotidiens en province, suivi par un nombre croissant de journalistes. Lui qui estimait il y a peu être victime d'une inégalité de traitement par rapport aux "candidats du système" est devenu la coqueluche des médias, y compris étrangers.
Pas de danger de surdose, estime toutefois Paul Bacot, dans la mesure où le député béarnais "aborde la phase finale sans qu'on l'ait entendu trop tôt". "C'est lui qui s'est imposé donc c'est pas trop gênant".
Dans son livre "Projet d'espoir", paru la semaine dernière, François Bayrou s'imagine en président à la fois solennel, simple, impartial, doté d'une "vision de la France".
"Il soigne son image d'homme d'Etat et en même temps, il s'est abstenu de s'adonner à certains 'trucs' de candidats. Par exemple il ne s'est pas cru obligé d'aller à l'étranger se faire photographier avec des chefs d'Etat", remarque Paul Bacot.
Le phénomène va-t-il durer ? "On n'arrête pas les vagues", assure l'intéressé. L'Ifop constate pour sa part une stabilisation des électeurs potentiels.
"Sa progression constante et continue s'est même accélérée ces dernières semaines alors que ses adversaires ont cessé de l'épargner, ont pris acte de sa dangerosité", remarque Jérôme Fourquet.
"Il progresse en volume et en solidité dans son électorat, qui demeure néanmoins le plus instable. Désormais, 45% à 50% sont sûrs de leur choix, contre 35 à 38% il y a une dizaine de jours".
Source :
http://www.lexpress.fr